Président LOL MAHAMAT CHOUA s'adresse à Monsieur Louis MICHEL,

REPUBLIQUE DU TCHAD
Unité - Travail - Progrès

COMITE DE SUIVI ET D'APPUI DE L'ACCORD
EN VUE DU RENFORCEMENT DU PROCESSUS DEMOCRATIQUE AU TCHAD

Adresse

à Monsieur Louis MICHEL,
Commissaire européen au Développement
et à I'Aide humanitaire, en visite au Tchad.

Par LOL MAHAMAT CHOUA,

N'Djamena, le 22 janvier 2008.

Monsieur le Commissaire,

Au nom de tous les membres du Comité de Suivi et d'Appui, je vous adresse mes chaleureuses salutations, à vous-même ainsi qu'aux membres de la délégation qui vous accompagne.

Je saisis cette occasion pour vous souhaiter une bonne et heureuse année 2008.Voeux de santé, de bonheur et de longévité pour chacun de vous.

Voeux de réussite et de succès dans vos entreprises au profit du développement et de la paix dans le monde.

Je voudrais particulièrement réitérer solennellement nos remerciements pour la sollicitude dont l'Union et la Commission européennes font montre à l'endroit de notre pays, de sa préoccupation toujours renouvelée à aider les tchadiens à résoudre les difficultés politiques, institutionnelles et les crises humanitaires auxquelles ils font face.

L'Union européenne a joué un rôle important, pour ne pas dire déterminant dans I'entame du dialogue entre acteurs politiques tchadiens et dans la conclusion de l'Accord Politique du 13 août 2007, en vue du renforcement du processus démocratique dans notre pays.

Un Accord fondamental, tant est-il que, de I'avis de tous, s'il est correctement mis en oeuvre, cet Accord est susceptible de permettre aux Tchadiens de mettre leur pays sur le chemin de la paix, de la construction d'un Etat de droit en vue d'un développement socio-économique durable.

ll est évident qu'aujourd'hui encore I'Union européenne est en première ligne dans les efforts de mise en œuvre de l'Accord. Le Comité de Suivi et d'Appui doit son fonctionnement à la Délégation ainsi qu'aux représentations diplomatiques des pays membres.

Nous nous réjouissons également, après la visite d'une mission de la Troïka octobre dernier, de recevoir une délégation conduite par le Commissaire Développement et à I'Aide humanitaire. Preuve supplémentaire, s'il en est besoin, I'intérêt de I'Union pour notre Accord.

Mesdames, Messieurs,

L'Accord politique dont nous sommes les gardiens a été signé le 13 août et le Comité de Suivi et d'Appui mis en place le 28 août 2007.

Deux semaines après la mise en place du Bureau, soit le 13 septembre, le Comité de Suivi et d'Appui a adopté le Chronogramme d'exécution de I'Accord. Celui-ci prévoit :


1- Les ajustements juridiques et institutionnels

ll s'agit des réaménagements et de l'élaboration des textes législatifs et réglementaires pour les mettre en conformité avec les termes de l'Accord.
Dans cette rubrique, des avancées significatives ont été réalisées :

- le mandat de I'Assemblée nationale a été prorogé ;

- le Comité a examiné deux (2) projets de textes de loi élaborés par le Comité lnterministériel chargé de la mise en oeuvre de l'Accord ; il s'agit du Code électoral et de la loi relative à la Commission Electorale Nationale lndépendante (CENI).

D'autres textes sont en cours d'examen. Ce sont: la Charte des Partis politiques, le Statut des autorités traditionnelles et coutumières, les Attributions des Chefs des unités administratives, la loi relative au Haut Conseil de la Communication et la loi relative à la Cour Suprême.

Ces textes revus feront l'objet d'un examen en Conseil des ministres avant d'être soumis à l'Assemblée nationale, pour ce qui concerne les lois,

2- Le recensement démographique et électoral :

Pour ce faire, il est prévu de commencer par la stabilisation du découpage administratif. ll importe en effet d'achever la délimitation des différentes unités administratives créées malheureusement sans ressorts territoriaux bien identifiés.


Ensuite, on procédera au dénombrement des habitants et leur répartition dans les différentes unités administratives. Nous rappelons que ce dont nous avons besoin pour le programme électoral, ce sont les effectifs des habitants de chaque unité administrative en vue de la détermination du nombre de sièges, notamment à l'Assemblée nationale.

Les résultats de ce dénombrement des habitants sont attendus. Selon le chronogramme, fin 2008. Ce qui permettra :

- L'élaboration, puis I'adoption de la loi organique fixant le nombre de
députés et leur répartition par circonscription ; et

- Le recensement électoral en 2009 avec établissement d'un fichier
électoral informatisé et sécurisé.

3 - L'organisation des élections législatives

Les élections législatives sont prévues en 2009. Dans cette perspective, il est envisagé la mise en place des différents organes en charge de leur organisation à partir du premier trimestre de 2008, à commencer par la CENI, ses démembrements et le Bureau Permanent des Elections.

Ces organes doivent être progressivement opérationnels pour engager les différentes opérations, allant du suivi du recensement démographique à I'organisation du scrutin, en passant par la campagne de sensibilisation et la détermination des bureaux de vote.

4 - Les mesures politico-administratives

Ce sont les mesures relatives à I'amélioration de la gouvernance :

- I'assainissement de l'Administration publique,

- la mise en oeuvre des résolutions des états généraux de I'Armée et de
la justice,

- la dépolitisation et la démilitarisation de I'administration territoriale par
un redéploiement raisonnable d'un personnel qualifié et expérimenté.

Ces mesures devraient être effectives à partir de maintenant.

5- La résolution des conflits armés

L'Accord du 13 août préconise de privilégier le dialogue comme voie de solution des conflits armés. On ne peut que se féliciter de la signature des accords avec les groupes en opposition armée.

Nous ne pouvons pas cependant ne pas exprimer notre inquiétude et notre désolation devant la reprise des hostilités à I'Est. Il faut relever la non implication des acteurs politiques dans la recherche de solution à ces questions de guerre et de paix.

Ces inquiétudes et désolations sont d'autant plus légitimes que notre Accord exhorte toutes les parties prenantes à s'investir ensemble dans la résolution de ces conflits.

Le rétablissement de la paix est à n'en point douter un facteur important dans la mise en œuvre de la résolution 1778 adoptée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies, le 24 septembre 2007.

6- L'information et la sensibilisation de la population

Les difficultés de démarrage des activités du Comité de Suivi et d'Appui n'ont pas permis de réaliser ce programme.

Des séminaires et ateliers de renforcement des capacités devront être organisés au profit des partis politiques, des organisations de la société civile, des syndicats, des associations féminines, des organisations des jeunes. Les responsables de I'administration civile et militaire pourront aussi être concernés.

La réussite de I'Accord dépend en grande partie de l'appropriation, par I'ensemble des forces vives du pays, de cette dynamique de paix, de renforcement de la démocratie et de promotion d'un développement durable.

Monsieur le Commissaire,

Comme vous le constatez, l'ensemble du peuple tchadien attend beaucoup de I'Accord du 13 août. ll attend de I'Accord qu'il consolide la décrispation de la situation politique, qu'il jette les bases de la construction d'une réelle démocratie et d'un véritable Etat de droit. On ne peut prétendre à la paix et au développement qu'à ce prix.

Toute la classe politique tchadienne en est consciente. Au niveau du Comité, nous croyons à la dynamique que la mise en œuvre efficiente de I'Accord pourrait entraîner.

Cependant, nous nous devons de vous faire part des appréhensions que nous avons, en attendant une première évaluation plus systématique.
Ce sont:

1- La non résolution correcte de la question du statut du Comité de Suivi et d'Appui.

Nous avons souhaité que les prérogatives du Comité de Suivi et d'Appui soient entérinées et endossées par un acte réglementaire de la Puissance publique.

Nous avons dû nous contenter d'un statut officieux; I'Accord demeure donc une entente entre associations privées ; et l'adhésion de I'Etat tacite, difficilement opposable de façon impérative, précaire pour ainsi dire.

Ceci d'autant plus que les responsables gouvernementaux ne se lassent pas de ressasser que I'Accord « n'engage en rien I'Etat ».

En dépit de tout cela, le Comité, au cours de sa Plénière du 23 novembre, s'est résolu à reprendre ses activités, estimant que le gel prolongé s'avérerait encore plus préjudiciable au processus.

2- L'absence de budget, avec pour conséquences :

- le manque des moyens de fonctionnement non prévus par la communauté internationale, l'Union européenne en I'occurrence ;

- des difficultés prévisibles dans les activités de terrain à savoir :

I'information et la sensibilisation dans les régions,

le suivi des activités de délimitation des circonscriptions administratives.

le suivi du dénombrement de la population,

la mise en place de la CENI et de ses démembrements,

le suivi du recensement électoral ainsi que des opérations électorales, etc.

2- Les risques de retard

Au rythme où est menée la mise en œuvre de I'Accord, il y a en effet des risques de retard :

- Dans la mise en place de la CENI et des démembrements ; retard découlant entre autres du blocage de l'adoption du décret portant statut du Comité et dans l'adoption des textes législatifs.

- Dans la disponibilité des éléments indispensables notamment :

la délimitation des circonscriptions administratives,

les données démographiques,


la fixation du nombre des sièges à I'Assemblée et par circonscription, liste électorale, fichier électoral, etc.

4 - Les difficultés liées à I’environnement général entre autres :

- la précarité de la situation sécuritaire du fait de la persistance de la guerre en dépit de la signature d'accords entre le Gouvernement et les groupes armés ;

- Ia non mise en œuvre des mesures propres à crédibiliser I'Etat, à savoir:

les nominations dans l'administration territoriale,

la dépolitisation des services publics,

la mise en œuvre des résolutions des états généraux de I'Armée et ceux de la Justice,

ll est à craindre que I'Accord ne soit sérieusement mis à mal si des actions concrètes, de nature à résorber ces appréhensions, ne sont pas engagées à temps et avec volontarisme.

Déjà que la population attend désespérément les impacts de l'Accord dans sa vie quotidienne.

Monsieur le Commissaire,

Le Tchad est à la croisée des chemins. La communauté internationale, l'Union européenne en premier, est à son chevet pour I'aider à éloigner le spectre de la guerre, de la violence et de la misère.

Plusieurs initiatives et projets, bien qu'entrepris séparément, concourent tous à la restauration de la paix, afin de faciliter la mise en œuvre des programmes de développement et de lutte contre la pauvreté.

L'Accord Politique du 13 août2007 offre un cadre de synthèse de ces différents projets et initiatives. Qu'il s'agisse des accords avec les groupes d'opposition armée ou de la Résolution 1778 du Conseil de Sécurité de I'ONU.

La dernière mission de la Troïka a déjà relevé notre disponibilité, nous acteurs politiques, à œuvrer dans le sens d'une synergie efficiente de ces accords et initiatives. Vous pouvez contribuer à rendre cette synergie effective.

Nous voudrions compter sur votre engagement déterminé pour faire face avec succès aux écueils relevés ci-dessus. Nous vous sollicitons en particulier pour :


- Le renforcement de la prise en charge du fonctionnement du Comité de Suivi et d'Appui. La signature du Devis Programme N" 09 AP CD 017 pour I'année 2008 est à saluer. Mais nous nous demandons s'il prend en compte toutes les activités et besoins essentiels du Comité.

- L'encouragement de tous les acteurs tchadiens, notamment les décideurs, à soutenir sans états d'âme, sans calculs et sans suspicion, l'exécution de I'Accord dans tous ses aspects : institutionnel, sécuritaire et électoral.

- La mise en œuvre des mécanismes à même de créer une efficiente synergie entre les différents accords, autour de l'Accord Politique du 13 août 2007.

- La mobilisation accrue de la communauté internationale sur le plan diplomatique et financier. Tant est-il que la restauration de la paix requiert le soutien actif , non seulement des grandes institutions internationales, mais aussi des pays de la sous région.

Tel est le message que j'ai tenu à vous adresser, Monsieur le Commissaire, au nom du Comité de Suivi et d'Appui, sur la situation de I'Accord Politique du 13 août 2007 obtenu grâce à la perspicacité de la Délégation de I'Union européenne et des représentations diplomatiques des pays membres de I'Union au Tchad.

Une fois de plus, nous vous remercions de tous ces efforts.

Nous voudrions compter sur vous, encore et toujours.

Je vous remercie.

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